jeudi 12 juin 2008

Paris (I) - Dépaysement

Matsushima ah, Matsushima!
Ah, Matsushima, ah!
Matsushima, ah!

Bashô, émerveillé par la beauté des 260 îles de la baie de Matsushima

Dès que l’on débouche du tunnel sous la Manche, les paysages changent – ou du moins on veut bien s’en persuader. La vitre de l’Eurostar - cette chambre magique qui se charge d’opérer la transmutation autour d’elle pour paraphraser Proust - découpe les cases d’une bande dessinée, qu’assise le dos au sens de la marche, je lis comme un manga. De loin en loin, la petite ferme et son tracteur, le village blotti contre son clocher, le bosquet isolé au milieu d’un vallon, la rivière qui serpente, me rassurent que je suis bien en France, cette doulce France pittoresque que l’on se forge quand on en vit loin. Je pourrais être ailleurs sur le territoire, à une autre époque même, plus ou moins lointaine. L’espace d’un instant, au détour de ce chemin creux que j’aperçois à l’horizon, l’imposante silhouette de François 1er à la poursuite d’un pauvre cerf, le fin destrier de D’Artagnan allant arrêter Nicolas Fouquet, le carrosse doré de Louis XIV en partance pour la guerre, pourraient surgir, sans que cela ne me plonge dans la moindre perplexité ! Mais, bien vite, ces vignettes s’estompent et nous revoilà catapultés dans le présent. On se remet à somnoler, à tirer des plans sur la comète en imaginant notre futur itinéraire dans un Paris bien contemporain où, contrairement au temps de Philippe-Auguste, nous ne risquerons pas de nous recevoir un pot de chambre sur la tête, même Passage de La Bonne Graine...
Mais... comment ne pas se remettre à rêver quand, au sortir du Métro Odéon, on se heurte au frais minois de Diderot ? A partir de là, et malgré tous nos efforts, nous n’avons cessé de chanter sur tous les tons : Paris ah, Paris ! / Ah, Paris, ah ! / Paris Ah !

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