samedi 31 octobre 2009

Gourmande Halloween

The devil tossed a burning coal into a hollow pumpkin and ordered him to wander forever with only the pumpkin to light his path. From that day to this he has been called Jack o’ the Lantern.

A chaque Halloween on me demande comment on dit pumpkin en français. Je ne m’y connais pas en botanique, alors je réponds citrouille ou potiron ou courge, selon que j’imagine un savoureux cake, une onctueuse soupe ou un délectable couscous !

vendredi 30 octobre 2009

Vivre avec Les Regrets

On a beau se dire que ce n’est qu’un film, une histoire close dont les héros n’existent pas et sont joués par des acteurs que l’on connaît très bien, on ne peut pas s’empêcher, en sortant de la salle de cinéma, de vouloir savoir – mais vraiment savoir, comme si c’était possible, comme si quelqu’un le savait - ce qui s’est passé dans la vie des personnages avant le film et comment leur histoire d’amour va se terminer, une fois que les caméras ne seront plus braquées sur eux. Le film continue à vivre dans notre imagination pendant plusieurs jours, il garde son mystère parce qu’on manque de réponses, on ne comprend pas vraiment les motivations des personnages, ils font tout et son contraire, et c’est un mouvement infini. La fin n’en est pas une et je me suis même dit que, peut-être, si ça se trouve, le film continue dans le cinéma de Leicester sq et je suis partie trop tôt ! Les Regrets de Cédric Kahn est passionnant.

jeudi 29 octobre 2009

C’est où, là?

J’aime bien l’émission J’apporte les croissants de Laurence Garcia sur France Inter (Le 5/7 du week-end). Début octobre elle est allée chez Anouk Grinbert (ici). A un moment elle lui a demandé si elle se sentait à l’aise dans les dîners mondains... Anouk Grinbert n’aime pas ça du tout. Elle a expliqué comment elle s’en protégeait et elle a dit cette phrase magnifique: « Je ne suis pas là pour ça ». C’est bon de savoir pourquoi on est là, d’aller vers ce qu’on pense être nous, où on peut conjuguer nos talents, nos valeurs, nos aspirations. Il faudrait souvent penser à cette phrase je crois.

mercredi 28 octobre 2009

Air pur

En allant voir Air Doll de Hirokazu Kore-eda, j’écoutais une émission de France Culture sur l’amour, dans laquelle parlait Pascal Bruckner. Il a raconté qu’un de ses amis, à chaque rupture, était le soir-même sur internet pour chercher la remplaçante de celle qui venait de le quitter et que ce refus de souffrir est caractéristique de notre époque. Je ne savais pas alors que le mot « remplaçant » et tous ses synonymes (troc, substitution...) allaient être la clé du dernier film de mon cinéaste japonais préféré.
A première vue elle pourrait sembler farfelue cette histoire de poupée gonflable qui, ayant « trouvé un coeur » (est-elle amoureuse? est-elle vraiment vivante? va-t-elle, par son sacrifice, sauver un coeur en détresse?), se retrouve avec la peau d’un être humain. Elle croise, tout au long du film, d’authentiques humains qui se sentent vides et inutiles. Ils ont tous trouvé un substitut à l’amour qu’ils ont perdu, un ersatz de l’amour perdu, un pis aller et non l’amour tout court. Quand sa métamorphose a lieu, son premier geste est d’ouvrir la fenêtre (quoique remplie d'air elle en manquait) et son premier mot est « kirei » (joli). Pourtant le spectacle n’est pas joli du tout (même si on voit la Sumida et qu’on est sur la si jolie île de Tsukishima dans la baie de Tokyo). A la fin du film on comprend que ce n’est pas ce qu’on voit de sa fenêtre qui détermine que l’on trouve la vie kirei ou pas mais plutôt la volonté de la trouver jolie.
Dans le film on voit souvent Odaiba, la Sumida, les ruelles de Tsukishima, le Rainbow Bridge et la petite plage devant Decks -le centre commercial d’Odaiba - et le cinéma Mediage. Cerise sur le gâteau : Jo Odaigiri (égal à lui-même) fait une courte apparition. On y voit surtout les immeubles illuminés sur les rives de la Sumida vus de la Yurikamome, le train-navette. J’aime voir, à la nuit tombée, ces petites fenêtres éclairées au loin, et les enseignes multicolores. C’est un spectacle qui m’émeut à chaque fois. Le Japon et Tokyo, si peu présents à mon esprit en ce moment, se sont rappelés à mes bons souvenirs. J’ai cherché les traces de mon attachement dans les images, dans la langue... je me suis demandé si j’y retournerais un jour prochain... En sortant, il faisait frais, et c’est en nouant mon écharpe que je me suis rendue compte que je l’avais achetée à Odaiba.

mardi 27 octobre 2009

Comme il vous plaira!


J'ai vécu assez longtemps :
et le chemin de ma vie se perd dans les feuillages jaunes et séchés.

Macbeth
Non, non, je ne reprends pas à mon compte les mots que Shakespeare met dans la bouche de Macbeth ! Mais récemment, dans la boutique du National Theatre, j’ai pu voir toutes les étagères dédiées aux oeuvres complètes du Barde dans de multiples éditions et à toutes les études qui la décortiquent dans ses moindres détails. Ce serait bien de la relire... J’ai résisté à acheter As you like it (la dernière édition en Penguin est vraiment attirante) car j’avais dans mon sac un livre de Françoise Sagan que je lis au rythme d’un paragraphe tous les deux jours...

lundi 26 octobre 2009

Marc de café

J’étais fatiguée fatiguée fatiguée et je venais de faire un somme – à mon très grand dam - devant le très court (1h) film de Manoel de Oliveira: Singularités d'une jeune fille blonde. Dès le départ mon sort s’était scellé devant l’interminable plan séquence d’un contrôleur de train poinçonnant au ralenti les billets de tous les passagers d’un wagon. Dans un demi-sommeil j’avais aperçu, derrière le personnage principal, la gravure du désastre de Lisbonne en 1755 (un de mes sujets favoris) et entendu le vers énigmatique suivant : « il s’agit de vivre exactement ». Deux secondes plus tard je roupillais pour ne me réveiller qu'au générique de fin...
Je n’ai jamais été aussi morte de fatigue que ça, et sans espoir de repos qui plus est. Il me fallait prendre un café bien tassé, plus noir que l’ébène, sinon je n'aurais pu honorer les deux rendez-vous qui m’attendaient. C’est quand je sirotais enfin ce café que son message du matin m’est revenu: « Je suis en train de traverser la Mer Noire, je vais à Tbilissi ». J’ai repensé au film de Godard – Une femme est une femme (?) – dans lequel il filme en gros plan la surface d’une tasse de café où l'on croit voir toute une galaxie. Dans l’élixir noir qui me redonnait des forces j’aurais voulu voir le bateau qui faisait la navette entre Istamboul et Odessa.

dimanche 25 octobre 2009

L’éclaireur

Je t’informe de ma présence
C’est un besoin d’infini.
Comme un incendie de J.-L. Murat
Parfois, l’utilité des nouveaux moyens de communication se révèle à nous dans toute leur splendeur. Par exemple, on somnole encore sous sa couette, rechignant à quitter un lit douillet, quand un bip-bip nous annonce un message disant à peu près ceci : « Je suis en route vers le nord. On se croirait en hiver ». Je n’ai pas dû chercher trop loin dans mes souvenirs pour imaginer les quais glacés ouverts aux quatre vents, le petit café toujours bondé avec son jus de chaussette et ses croissants en caoutchouc. J’imaginais, du fond de mon lit, les passagers fantomatiques dans le coltard, avec la buée qui sortait de leurs bouches, tentant de réchauffer leurs doigts gourds autour d’un gobelet de thé sans goût. Mais, surtout, je le voyais lui, à part. Ses 12 mots lui donnaient de l’épaisseur, comme s’il était le seul être vivant à bord de ce train express, partant défricher pour moi la journée qui commençait.

samedi 24 octobre 2009

Plus belle la vie de D.

D. est partout parce qu’il vient de sortir un gros bouquin. La semaine dernière il commentait la presse à la télé. Il était assis près d’une baronne qui s’enflammait contre les bonus que s’octroient les banquiers. Il a glissé : « Je vais en parler sur Twitter ». Et la baronne a concédé qu’il était temps qu’elle se mette à la page et qu’elle se serve de ces nouveaux moyens de communication. Sur Twitter, il parle de ses voyages (il sillonne la planète), de ses prouesses sportives (il faut qu’il nage, qu’il plonge, qu’il vole, qu’il plane au quotidien), de ses documentaires (à voir absolument), de son papa (dad), de sa tante (auntie), et de toute sa famille dont presque chaque membre est célèbre. Il y a D. à Washington, D. sur un porte-avion, D. à Hampton Court, D. entouré de rombières, D. assailli par des jeunes filles, D. et son papa visitant un musée, D. en t-shirt, en pull, chapeauté et ganté... D. ne se départissant jamais de son beau et franc sourire, D. couvant de ses yeux clairs son cher papa d’un regard plein d’admiration, D. devant la maison de famille au Canada... C’est un vrai feuilleton médiatique. D. se veut "the guy next door", si seulement...

vendredi 23 octobre 2009

Des lieux que pour leurs beautés/J'aurais pu croire enchantés (La Fontaine)

C’est ce qu’on appelle une belle baraque, une maison comme on n’en voit que dans les magazines, et qui semble inaccessible. Elle se trouve à deux pas d’où j’habite mais nichée dans une ruelle si tranquille et si inconnue de moi que j’avais l’impression d’arpenter les rues d’un village avant de la trouver. Dans le parc voisin, deux semaines avant Halloween, on tirait déjà un feu d’artifices. Quand je suis arrivée dans l’allée, avant de faire retentir le heurtoir à tête de lion, j’ai observé la façade et ses pièces illuminées. J’ai aperçu un violoncelle et des tableaux dans des pièces spacieuses aux murs clairs.
Un beau labrador blanc m’a fait la fête. Un large couloir carrelé menait à une cuisine immense. J’aime le bric-à-brac, tous ces objets accumulés lors de voyages autour du monde, mais qui ne sont pas dépareillés, qui forment une harmonie. Sur un pan de mur de la cuisine on avait disposé de petites reproductions de tableaux de la Renaissance, du plus bel effet, leurs couleurs vives se mariant avec le décor. Je pouvais deviner un grand jardin mais il faisait trop noir pour en distinguer la moindre plante. C’est une maison bourgeoise typiquement anglaise. On pourrait y tourner un film, y situer un roman. Quand j’en suis repartie, le maître de céans a coupé un brin d’herbe devant sa porte. Un puissant parfum de romarin s’est alors élevé dans la nuit londonienne.

jeudi 22 octobre 2009

Feuilles d'or

On a eu beau résister mais dimanche dernier il a fallu mettre le chauffage. Il y a toujours une petite appréhension au moment d’appuyer sur le bouton: et si la chaudière avait rendu l’âme pendant les beaux jours ?Sur ces feuilles de chêne en or, se cachent une mouche et deux cigales. C’est une magnifique parure grecque antique.
Elle fait regretter qu’au dehors du musée il faille attendre encore un peu pour voir les feuilles prendre leurs couleurs automnales mordorées.

mercredi 21 octobre 2009

Inventaire-Invent/erre

En ce moment, tout me semble un peu irréel. J’essaye de mener de front une vie professionnelle (avec ses déplacements, ses horaires à respecter impérativement, etc.) sans trop bousculer les habitudes que j’ai prises depuis 5 mois, d’où les rêves bizarres de ces dernières semaines. Soit, je me suis donné les moyens de pouvoir combiner les deux, mais j’avais oublié une chose : travailler, même si on aime son métier, fatigue. C’est tout moi d’oublier cette donnée dans l’équation... Mais le bon côté de ce surmenage, c’est cette impression d’avoir vraiment vécu à fond chaque minute, et surtout de ne plus voir instinctivement que les bons côtés de la vie. La semaine dernière de petites choses ont vraiment égayé mes journées : en passant près du Modern Snack Bar vers King’s Cross, j’ai surpris le salut chaleureux entre un marmiton et un balayeur de rue. Il était vraiment tôt le matin. L’un lisait le journal dans son café et l’autre passait devant. Ils se sont fait de grands signes et de grands sourires et ça m'a fait du bien de penser que cette jolie scène devait se répéter tous les jours ; une autre fois, un homme est monté dans le bus et il portait le même manteau que Franz Kafka, celui avec les grandes poches qui permettaient de cacher les longues mains qu’il n’aimait pas trop.Il y a eu aussi cette femme, plantée devant un tableau de Turner, claironnant qu'il était très inhabituel pour le peintre. A ces mots on marqua un temps d’arrêt pour mieux le regarder. Cette Madame Je-sais-tout devant une autre oeuvre déclara : « He just can’t paint faces », ce qui veut dire « Quel nul ce Turner, vraiment les visages, c’était pas son fort ! » Que c’était bête!; et cette magnifique émission sur L’Enéide de Virgile, où l’on évoquait Carthage, Didon, Enée « le cruel Dardanien », la découverte de la statue du Laocoon au XVIe siècle qu’avait décrite Pline l’Ancien... Pendant la lecture très sensuelle, parfois fougueuse, des vers de Virgile, on entendait distinctement le cliquetis des perles du collier de la lectrice... Cette lecture opportune me permettra de mieux apprécier le lendemain un tableau de Turner intitulé « Enée et la Sybille ».Dans une ambassade étrangère l’employé était par chance originaire de la ville dont je porte le nom. Il m’a parlé de sa grand-mère. Et moi je contemplais ses yeux de braise. Et ce rendez-vous que je redoutais s’est changé en discussion très plaisante ; je vais pour acheter des billets de train et l’on m’annonce que mon parcours me permet de voyager en première classe pour bien moins cher qu’en seconde... je n’ai pas encore compris comment cela est possible... ; j’ai pu, après une longue réunion et juste avant un cours, me balader au British Museum et découvrir des choses que je n’avais pas encore vues malgré mes multiples visites... Je pourrais ainsi continuer longtemps à énumérer ces bons petits moments de la semaine dernière, qui me laissent croire que le bonheur engendre le bonheur.

mardi 20 octobre 2009

Belle échappée

En sortant de l’expo Turner à la Tate Britain, ces arbres du bord de la Tamise au pied du musée, me semblaient tout droit sortir d’un de ses tableaux. Il suffirait de remplacer les affreux immeubles modernes par un vieux château décrépit. Contrairement au mois d’août, malgré le soleil, nous ne pouvions pas naviguer sur le pont. Le bleu du ciel faisait penser aux tableaux des grands maîtres (Titien ou Canaletto) qu’admirait Turner. C’était bon de sentir la houle et de se laisser bercer le temps d’une traversée.

lundi 19 octobre 2009

Pas touche!

Et mon dos, dis, tu l'aimes mon dos? Celui de ce dieu bélier appelle vraiment à la caresse. Mais j'ai trop peur de me faire hurler dessus par un des gardiens si je n'y pose autre chose que les yeux.
Et mes ravissantes serres, dis, tu les aimes ?Heu... oui oui, elles sont jolies...
Juste en face il y a un petit faucon. On dirait que tous les deux s’observent et que l’un dit « oui chef, oui chef ! » à l’autre...
Et mes pieds, si bien manucurés, dis, tu les aimes ?Et cette main, qui tient si fermement le symbole de vie, elle est à qui ?

Pas à une alouette en tout cas!

dimanche 18 octobre 2009

Lever le pied pour lever le siège

Je n’étais pas seule. Je donnais des ordres. Je croyais que les lourdes portes de bois et de fer allaient nous protéger. Nous étions aux abois. Et puis nos assiégeants se sont mis à défoncer les portes à coups de bélier. Je savais que nous allions être écrasés. Les portes ont fini par céder et une armée entière a déferlé sur nous. J’ai fermé les yeux et je me suis senti mourir. Je me suis abandonnée à l’inévitable.
Heureusement, j’ai ouvert les yeux. Ce n’était qu’un cauchemar. Mais comme le rêve d’il y a quelques jours, j’ai tout de suite vu qu’il était lié à mon travail. J’ai pensé que mon subconscient m’avertissait que si je continuais sur ce rythme j’allais vite me laisser bouffer par lui.
Mais j’ai encore cette sensation de cette mort sous le glaive. Je devrais arrêter de lire des livres sur les Aztèques et les Romains !

samedi 17 octobre 2009

Temps pas perdu dans le bus

Quand j’arrivai pour la première fois dans la chambre de Proust, qui était la pièce dont il ne quittait presque jamais, et alors il était là, dans cette pièce, tout seul, entouré de tous ses livres, d’un superbe piano et de meubles jolis. Marcel Proust vivait complètement allongé et travaillait toujours à son lit, avec une petite table de chevet chargée de ses notes et de ses livres et un petit plateau où je servais son petit déjeuner car il mangeait très peu et prenait très peu de choses dans la journée.

Céleste Albaret en 1949
(2000 ans d’Histoire, France Inter)
Ce matin-là, dans un bus bondé, j’écoutais Céleste, la gouvernante de Proust. Je l’ai vue pénétrer dans sa chambre pour la première fois. J’ai superposé à son récit la photo de Proust sur laquelle son visage repose sur sa main, et je l’ai affublé d’une belle moustache bien lustrée. J’ai vu des livres posés en quinconce sur la table de chevet, avec des post-its anachroniques qui en dépassaient, près d’un verre d’eau fraîche parce que j’avais soif. J’ai pensé que j’aimerais essayer de rester une journée entière dans mon lit, juste pour voir. Je me suis dit que j’arriverais encore trop tôt à la fac et que j’allais pouvoir prendre mon petit-déjeuner avant mon cours. Le « et alors il était là » de Céleste ne m’a pas quitté de la journée et me donne encore des frissons.

vendredi 16 octobre 2009

Prof un jour prof toujours!

Miroir magique au mur, qui a beauté parfaite ?
Célèbre est ta beauté, Majesté. Pourtant, une jeune fille en loques dont les haillons ne peuvent dissimuler la grâce est hélas encore plus belle que toi.
Décris-la-moi ! Apprends-moi son nom !
Lèvres rouges comme la rose... Cheveux noirs comme l’ébène... Teint blanc comme la neige...
Blanche-Neige !

Blanche-Neige vue par Walt Disney
En plus de faire resurgir mes premiers émois cinématographiques, entendre cet extrait de Blanche-Neige m’a aussitôt fait penser que ce dialogue serait un bon exercices de grammaire sur les pronoms...

jeudi 15 octobre 2009

Signe de stress

J’écoutais une émission radio dans laquelle un auditeur venait de gagner un séjour dans un spa des Vosges. J’ai dû me rendormir aussitôt après avec la vision de la forêt des Vosges flottant dans la tête. Je me suis mise à rêver que je partais en vacances dans un très bel endroit. J’étais partie à la va-vite car je n’avais pas pris d’autre argent que les quelques pièces qui se trouvaient dans mon porte-monnaie. Je n’avais pas non plus mon appareil photo. Je voyageais sur une route de montagne sinueuse, et puis la nuit, je marchais dans une ville, les rues étaient pavées, et m’arrêtais devant le socle d’une statue. Mais comme je n’avais ni argent, ni appareil photo, je décidais de rebrousser chemin et de repartir plus tard, mieux équipée. Pourquoi, en mettant des mots sur le rêve que je viens de faire, je pense à mon départ au boulot, aux listes que l’on m’a données qui ne correspondent pas à la réalité, et à l’administration qui accuse les ordinateurs de s’être trompés ? Vivement que je me réveille de ce cauchemar !

mercredi 14 octobre 2009

Pas banal

Vivre sans vous laisser torturer par l’idée que tout est si profondément stupide et corrompu – en vous tournant, pour vous épanouir, vers vos livres, votre musique, votre partenaire et votre jardin.
Exit le fantôme de Philip Roth
Ce que dit Philip Roth peut sembler une banalité. D’autres avant lui ont dit la même chose, Voltaire ou Montaigne, pour ne citer qu’eux. Mais j’aime cette phrase pour, d’abord, le « sans vous laisser torturer ». Il faut être intransigeant avec soi-même pour ne pas se laisser envahir ou influencer par les ambitieux, les mauvaises nouvelles, les petites mesquineries, les incivilités, et garder foi en la vie. C’est tout un entraînement, qui gaspille notre énergie au début, mais à un moment, on s’élève de plus en plus facilement au-dessus de tout ça, et on s’épanouit vraiment. J’aime le verbe « épanouir » aussi. Il épouse exactement, dans ses sonorités, ce que l’on ressent quand quelque chose nous fait plaisir et que ce dernier nous envahit et se propage en nous, et dure, et n’en finit pas de s’étendre et de nous faire du bien en nous et dans tous les domaines de notre vie. Dans cette phrase j’aime aussi le « en vous tournant », car c’est vraiment un mouvement mental et physique à la fois. Il faut apprendre à résolument tourner les talons, et je dirais même à couper les ponts et tous les moyens de communication avec ce ou ceux qui vous entraînent vers le bas. Et j’aime aussi le « vos » et les « votre » à la fin de la phrase, car cet épanouissement nous appartient, on se l’est donné, et personne ne peut nous l’enlever.

mardi 13 octobre 2009

Le clou du voyage


C’est convenable, c’est droit: prends soin des choses de la terre: fais quelque chose, coupe du bois, laboure la terre, plante des figuiers, plante des agaves; tu auras de quoi manger, boire, te vêtir.
Avec tout cela tu seras sur pied, tu suivras ton chemin.
Avec tout cela on parlera de toi, on te louera, tu feras savoir qui tu es à tes parents et à ta parenté.
C’est toi qui maintiens, qui soignes : l’aigle, le tigre.
Que tu vives sur terre, que tu dures un tant soit peu.
Que sais-tu ?
Regarde les choses posément, de façon sensée.
On dit que c’est un monde de difficultés, de grande saleté, de trouble, lieu sans plaisir, effrayant, désolant.
Il n’existe rien de vrai.

Le destin brisé de l’empire aztèque de S. Gruzinski
Il y a deux semaines, je mettais les pieds pour la première fois dans ce musée pour voir une exposition sur la photo iranienne qui m’a un peu déçue parce qu’on n’y mentionnait même pas le nom d’Abbas Kiarostami. Je me demande bien pourquoi... peut-être est-ce lui qui ne le voulait pas ?

Mais ce qui m’a vraiment époustouflée ce sont les collections de ce musée que l’on a su mettre en valeur d’une façon extraordinaire. J’avais l’impression d’avoir pénétré dans la caverne d’Ali Baba. On entendait des coups de marteau et des bruits de perceuse car on y préparait encore l’expo sur Teotihuacan. Je crois que je n’ai jamais vu autant de belles choses en si peu de temps, c’était fabuleux. Il était assez tard, le musée était quasi vide, je n’avais pas beaucoup de temps devant moi, j’étais sur les rotules... Dans les vitrines on pouvait lire parfois que telle ou telle pièce avait été prêtée au British Museum pour l’expo Moctezuma (dont on parle sur France Culture ici). De penser que quelques heures plus tard j’allais me retrouver à Londres et passer à deux pas de ce musée me donnait le vertige, comme s’il suffisait que je cligne les yeux pour me retrouver chez moi ou que j’étais en train de rêver.

lundi 12 octobre 2009

Ne jamais dire: "Fontaine, je ne boirai jamais de ton eau"

Love, Love, Love, Love, Love, Love, Love, Love
Love, Love, Love, Love, Love, Love, Love, Love
Love, Love, Love, Love, Love, Love, Love, Love

Love, Love, Love, Love, Love, Love, Love, Love
Love, Love, Love, Love, Love, Love, Love, Love
Love, Love, Love, Love, Love, Love, Love, Love

Chanson (inspirée!) de Air dans Love 2
Mais comment ne pas lui préférer le récit des amours d’Acis et Galatée tel que le fait Ovide dans les Métamorphoses ? Le Polyphème de la Fontaine Médicis au Jardin du Luxembourg est vraiment impressionnant !
Le bel Acis n'aimait que moi. Je l'aimais, et Polyphème me poursuivait sans cesse de son amour. J'étais cachée dans une grotte, où, penchée sur le sein d'Acis, j'entendis de loin les chansons du Cyclope; il disait : Galatée, tu es plus blanche que la feuille du troène, plus fleurie que les prés émaillés. Ta taille est plus élancée que l'aulne; ton sein a plus d'éclat que le cristal. Tu es plus vive qu'un jeune chevreau; plus polie que le coquillage lavé par les flots; plus agréable que le soleil dans l'hiver, que la fraîcheur de l'ombre dans l'été; plus vermeille que la pomme, plus majestueuse que le haut platane, plus brillante que la glace, plus douce que le raisin dans sa maturité, plus moelleuse que le duvet du cygne, et que le lait caillé; et, si tu ne me fuyais point, plus belle pour moi que le plus beau jardin.
Cependant, si tu me connaissais bien, tu te repentirais de m'avoir fui. J'ai des arbres dont les rameaux plient sous le poids de leurs fruits. J'ai des vignes chargées de raisins que l'or jaunit, et j'en ai que la pourpre colore. C'est pour toi que je les garde. Si je suis ton époux, les châtaignes ne te manqueront point; tu auras des fruits en abondance; et mes arbres s'empresseront de te les offrir. Mais pourquoi, méprisant ma flamme, es-tu sensible à celle d'Acis ? Enfin, il m'aperçoit avec Acis. Saisie d'épouvante, je me plonge dans la mer. Le fils de Syméthus avait pris la fuite. Le Cyclope le poursuit; il détache de la montagne un énorme rocher, il le lance. Sous le roc, le sang d'Acis coulait en flots de pourpre : sa couleur s'efface par degrés; c'est bientôt l'eau d'un fleuve qu'ont troublée la pluie et les orages; c'est enfin l'eau d'une source limpide. La pierre s'entrouvre, et de ses fissures sortent des roseaux à la tige élancée. Dans le creux du rocher l'onde bouillonne et murmure; elle jaillit de ses flancs. Mais, ô prodige ! du sein de la source un jeune homme s'élève : son front est paré de cornes naissantes, et des joncs le couronnent : c'était Acis, mais devenu plus grand. L'azur des flots colorait son visage : c'était Acis, changé en fleuve; et ce fleuve a conservé son nom.
Galatée cesse de parler. Les Nymphes qui l'ont écoutée se dispersent et nagent dans de paisibles mers.