jeudi 31 décembre 2009

La ré-édition du seuil

Tu ne dois pas te tenir pour malheureuse quand tu as, entre autres biens, une des choses du monde qui te cause le plus de délices et de plaisir, c’est assavoir le doux goût de science.

Le Livre de l’advision Cristine de Christine de Pizan (1405)
Derrière la Porte de l’Année Nouvelle, à travers ses interstices, je distingue un jardin, dans la continuité de celui que je vais quitter. Vive le « doux goût de science » dont parle Christine de Pizan: il rend optimiste, léger, heureux.

mercredi 30 décembre 2009

« Admiration joyeuse me tenait émerveillée »

Et aussi eut, avec le grand savoir, qui fut moult notable, moult belle parlure et façon de très gracieuse l’excellent duc de Bourgogne.
Le Livre du corps de policie de Christine de Pizan
Dans Les 400 coups de François Truffaut, Antoine Doisnel, après avoir lu Le chef d’oeuvre inconnu, allume une bougie à Balzac. Je comprends tout à fait ce qui le pousse à faire ce geste : il y a quelqu’un, à Londres, qui rassemble en lui toutes les qualités que Christine de Pizan reconnaissait à Philippe le Hardi. Et mon « admiration joyeuse » (que Christine ressent à l’encontre du duc Louis d’Orléans cette fois) me pousserait presque à lui allumer une bougie!

mardi 29 décembre 2009

Fontaine, j'en aurais bu de ton eau!

Je suis toujours attirée par les fontaines lumineuses parce qu’il y en avait une à Casablanca, place des Nations Unies. Pour passer devant à l’heure tardive où elle fonctionnait c’est que nous avions fait quelque chose d’inhabituel car nous n’habitions pas du tout dans le coin. Mais je sais très bien quelles sont les circonstances de la photo ci-dessus d’une des fontaines de Trafalgar square, le 5 octobre dernier... C’est comme si j’avais photographié ce qui se passait dans ma tête et dans mon coeur.

lundi 28 décembre 2009

Guerre et Paix à Waterloo

Une des entrées de Waterloo station se fait par la Victory Arch « dedicated to the employees of the company who fell in the war ». La compagnie c’est la London South-West Railway (LSWR). Les employés étaient 585 et le théâtre des opérations c'était la Belgique, l’Italie, les Dardanelles, la France, la Mésopotamie, l’Egypte, et la Mer du Nord, comme nous le rappellent les écussons disposés en arc de cercle.Posée sur le toit, un trident à la main, la déesse Britannia est aux premières loges : je me demande combien de milliers de banlieusards passent par cette porte du matin au soir sans lui jeter un seul coup d’oeil. Moi j’avais le temps, j’étais en vacances et mon train n’était qu’à 10h05. J’étais donc à contre-courant de la majorité des voyageurs qui jaillissaient hors des trains pour s’engouffrer dans le métro. Ils fonçaient tête baissée, gare à vous si vous vous trouviez sur leur chemin !Entre la sortie des trains et l’entrée du métro, le parcours de ces hommes et de ces femmes pressés est jalonné de petites boutiques qui bizarrement ne servent à rien quand on a du temps à perdre (il n'y a rien à voir), mais qui sont essentielles quand on est pressé. On s’y bouscule, on y joue des coudes, et parvenus à la caisse vous avez intérêt à ne pas mettre des plombes pour trouver votre porte-monnaie. Il ne doit pas y avoir un seul temps mort. C’est le règne de l’impatience, du piétinement, des soupirs courroucés. Il faut que ça circule! Il faut que ça slalome, tambour battant, entre l’achat du sandwich pour le déjeuner de midi (ou de la salade de fruit, du bagel, du muffin, des cookies, des fruits secs), d'une carte d’anniversaire pour une collègue, d'un journal... Comme la gare, toutes les boutiques ont plusieurs portes pour faciliter l’écoulement de ces hordes impatientes. Cette armée d’employés une fois passée – un peu comme les terribles chevauchées du roi Edouard III en Normandie pendant la guerre de cent ans – le calme revient graduellement. On peut alors commander un café et le siroter tranquillement, on peut flâner chez le marchand de journaux et feuilleter Voici et Paris Match en toute impunité, lire son horoscope pour 2010 dans Marie-Claire et acheter Le Monde, bien sûr ! Pas l'inverse...
J’ai une certaine tendresse pour tous ces voyageurs courant d’air. En observant leurs petites routines ce matin-là, je me suis réjouie d’autant plus d’avoir abandonné mon train train quotidien pour quelques semaines !

dimanche 27 décembre 2009

Bienheureuse et béate

Je ne sais pas si l’Evêque William de Wykeham (1320-1404), qui pour Edouard III reconstruisit le château de Windsor et qui, sous Richard II, fut Chancelier d’Angleterre, serait content d’apprendre que son nom a été donné à un fameux Sheperd’s pie (hachis parmentier), spécialité d’un pub de Winchester à ses armes, et servi sous le nom de « Wykie ».
Mais comment ne pas donner sa bénédiction à ce pub si accueillant? Et si, comme le dit sa devise, c’est « à ses manières qu’on reconnaît l’homme (et la femme) » (Manners makyth man), je pense qu’il aurait canonisé d’office la très gentille personne qui m’y a invitée !

samedi 26 décembre 2009

Le chevalier inconnu

J’aimerais bien savoir quel est ce chevalier en cotte de mailles qui se trouve dans la Cathédrale de Winchester. Sa tête repose sur un coussin et il a les yeux ouverts. J'aime les mains des statues, et la sienne, posée sur le pommeau de son épée dans un geste émouvant, est si très réaliste qu'on a envie de la prendre dans la nôtre. Mais je suis trop trouillarde et j'aurais peur qu'il me la saisisse!Ses pieds touchent le dos et le flanc d’un lion. Il est peut-être de la famille d’un roi d’Angleterre ? A moins qu’il ne cherche à repousser la bête hors de sa couche, comme quand le matin, un chat vient vous ronronner au visage et vous empêche de vous rendormir ?Autour de lui se trouvent les somptueuses tombes des évêques de Winchester et leurs chapelles, leurs anges en prière, leurs voûtes bleues comme les cieux. Une plaque nous les présente, et si d’aventure on s’en approche, un des guides, bien obligeant, nous raconte leur vie en long et en large. Mais c'est lui qui me touche le plus. Qui est-il?

vendredi 25 décembre 2009

Mon beau sapin, roi des forêts...

It was no summer progress. A cold coming they had of it, at this time of the year; just, the worst time of the year, to take a journey, and specially a long journey, in. The ways deep, the weather sharp, the days short, the sun farthest off in solstitio brumali, the very dead of Winter.

Of the Nativity de Lancelot Andrewes

Cher Père Noël, c’est une blague quand je dis que mon sapin se trouve le long de la voie ferrée Londres-Winchester. Ce n’est pas là que j’ai laissé mes petits souliers! D'accord? Joyeux Noël !

jeudi 24 décembre 2009

"All this was a long time ago, I remember..."

A cold coming we had of it.
Just the worst time of the year
For a journey, and such a long journey:
The ways deep and the weather sharp,
The very dead of winter.

Lancelot Andrewes était un important homme d’église sous les règnes d’Elizabeth I et James I. Il est célèbre pour ses sermons dont celui sur le Gunpowder Plot (la Conspiration des Poudres) en 1605 et c’est à cause de lui que tous les 5 novembre on célèbre la Guy Fawkes Night avec moult pétards et feux d’artifice. Son sermon sur la Nativité, le 25 décembre 1622, a inspiré le poème de T.S. Eliot The Journey of the Magi en 1927 (extrait ci-dessus). Tout cela je l'ignorais encore en prenant une photo de sa petite effigie sur un des murs de la Cathédrale de Winchester.Ce qui m’avait attirée c’est surtout son nom car nous allions ensuite visiter le Great Hall du château de Winchester pour admirer la Table Ronde du Roi Arthur. Enfin... son imitation, datant du XIIIe siècle, et repeinte en l’honneur de Henry VIII. J’ai un faible pour cet endroit : mon premier voyage hors de Londres, le 1er novembre 1987, avait été pour Winchester car mon Mémoire de Maîtrise portait sur le mythe arthurien « and the archetypal knight in the works of Malory and Tennyson ». Le 1er novembre 1987, il faisait gris, je me rappelle. On entrait par une porte face à la Table Ronde dont on apercevait les dorures. Il fallait payer un droit d’entrée. On vendait des cartes postales et des crayons à l’effigie de la Table Ronde que j’avais gardés comme des reliques pendant des années. L’ambiance était si solennelle qu’en voyant la Table Ronde, j’avais versé une petite larme d’émotion (quelle bécasse). Cette fois-ci il faisait grand soleil mais les rues étaient couvertes de neige et les trottoirs transformés en patinoire. On entre désormais sur le côté comme dans un moulin. Alors, combien, ce soir, lors du Réveillon, vont se prendre pour le Roi Arthur et entonner : Chevaliers de la Table Ronde, goûtons voir si le vin est bon... ? Bon réveillon!

mercredi 23 décembre 2009

Nicolas Fouquet-Louis XIV 1-0

En patois « fouquet » désigne l’écureuil d’où les armes de Nicolas Fouquet, le célèbre Surintendant des Finances de Louis XIV. On connaît le funeste destin que lui réserva le Roi après la somptueuse fête au château de Vaulx-le-Vicomte en 1661. J’aurais donc dû me douter, en observant le manège d’un écureuil et d’un corbeau (contente de voir que ces derniers avaient grossi et qu’ils peuplaient encore le quartier !), que ma visite d’un jour à Versailles serait compromise ! Nul besoin d’être Merlin l'Enchanteur pour le deviner!Quelques heures plus tard il se mit à neiger à gros flocons. Il gelait à pierre fendre et trottoirs et chaussées en furent verglacés.L’Eurostar refusa de démarrer et même s’il l’avait pu, le RERC qui mène à Versailles subit un déraillement qui l’immobilisa pour 3 jours.
Comme je compte aller à Vaulx dès que le château rouvrira ses portes au printemps, je m’attends maintenant à ce que le soleil me tombe sur la tête ! Ils pourraient régler leurs différends d’une autre façon ces deux là !

mardi 22 décembre 2009

Souvenirs de neige

Snow means such special things to me. It means a fat soft plop, plop, as it is shovelled off the roofs and falls into the courtyard below. It means the strange melancholy halloo by wich the deer are called to be fed, and which brings them bounding from all corners of the park.

Lettre de Vita Sackville-West à Virginia Woolf
17 janvier 1926
Des toits enneigés, une promenade bien emmitouflée, le coeur léger, dans une petite ville, les bûches dans les cheminées et leur parfum dans toutes les rues... et me revoilà au Maroc, à Immouzer du Kandar ou à Ifrane, à l’Hôtel Le Perce-Neige. Dernièrement je marchais dans les rues de Winchester et j’ai soudain eu un sentiment de déjà-vu : l’Immouzer et l’Ifrane de mon enfance me poussaient à avoir une petite pensée pour elles, comme dans une sorte de brume neigeuse.J’ai dit à N. : « It reminds me of Morocco ». Je ne lui ai pas raconté la blancheur de la neige dans le Moyen Atlas ; ni mon anorak à carreaux ; ni mes descentes en luge sur les pentes d’un volcan endormi en faisant attention qu’il ne se réveille pas (on avait déjà dû me parler de Pompéï) ; ni les immenses cèdres et les forêts de sapins à perte de vue. J'avais seulement eu envie de dire "le nom de Maroc dans Winchester l'hiver".

lundi 21 décembre 2009

Changement de saison

Tapis de neige
Couverture sur le dos des chevaux
Chapeau l’hiver !

dimanche 20 décembre 2009

D'un coucher de soleil à l’autre

Venta Belgarum c'est dans le conté du Hampshire, dans le sud de l’Angleterre. « Comptoir des Belges » c’est le nom que les Romains avaient donné à un lieu sur les bords de la Itchen, où des membres de la tribu des Belgae s’étaient installés et commerçaient. Au Ve siècle, les Romains ayant plié bagages, la cité fut rebaptisée du doux nom de Caergwinntguic (Forteresse blanche) et en 519, lors de la prise de la ville par les Anglo-saxons, elle devint Wintanceastre puis Winchester. Et c’est là que je venais de passer une magnifique journée.Je me suis retournée pour voir le soleil se coucher du côté de Winchester en songeant à Kyoto, il y a un an (ici). Ce voyage de retour au travers de la campagne enneigée, bercée par les mouvements du train, la tête pleine des souvenirs de la journée, c'était bien!

samedi 19 décembre 2009

The simplest words in sorrow are the best

« Nous n’avons jamais lu Vita Sackville-West » a dit Diana à Alex, Deborah et Peter. Je venais de leur vanter les mérites de The Easter Party, en finissant mon dithyrambe par mon « j’ai adoré adoré adoré » habituel. « Good idea » a-t-elle dit en notant le titre pour le proposer à son Book Club. J’étais vraiment satisfaite : j’aimerais que la planète entière lise ce livre ! C’est un début... Alex avait cuisiné une paëlla délicieuse mais qui a dû faire se retourner tous mes ancêtres espagnols dans leurs tombes : il avait mis des épinards dedans ! Des épinards dans la paëlla... Why not ? Je venais de finir, juste avant notre dîner, une anthologie des textes de Vita Sackville-West où se trouvent quelques-uns de ses poèmes. Celui-ci, In Memoriam: Virginia Woolf, magnifique, un portrait-hommage, publié dans le journal The Observer en avril 1941, me touche, par ses images (her moth-like self) et l’évocation de ce que Virginia Woolf aimait à Londres et ses goûts. C’est un poème tendre, admiratif, et déchirant je trouve. (Mosaïques de Spitafields Market)
Many words crowd, and all and each unmeaning.
The simplest words in sorrow are the best.

So let us say, she loved the water-meadows,
The Downs; her friends; her books; her memories;
The room which was her own.
London by twilight; shops and Mrs. Brown;

Donne's church; the Strand; the buses, and the large
Smell of humanity that passed her by.

I remember she told me once that she, a child,
Trapped evening moths with honey round a tree-trunk,
And with a lantern watched their antic flight.
So she, a poet, caught her special prey
With words of honey and lamp of wit.

Frugal, austere, fine, proud,
Rich on her contradictions, rich in love,
So did she capture all her moth-like self:
Her fluttered spirit, delicate and soft,
Bumping against the lamp of life, too hard, too glassy,

Yet kept a sting beneath the brushing wing,
Her blame astringent and her praise supreme.

How small, how petty seemed the little men
Measured against her scornful quality.

Some say, she lived in an unreal world,
Cloud-cuckoo-land. Maybe. She now has gone
Into the prouder world of immortality.

vendredi 18 décembre 2009

Ça flotte

I dreamt that the whole population of the earth was floating away. They hovered just above the surface of the earth, with their feet dangling a few inches above. Eventually they all floated away - and the earth was left to itself, without any people on it at all. Then it seemed extaordinarily beautiful and unpolluted. It seemed to have returned to what it was meant to be.

Le Livre de rêves de Vita Sackville-West
C’est marrant de tomber sur ce rêve de Vita le jour où se termine le sommet de Copenhague. Moi aussi je flotte : je suis enfin en vacances de Noël. Toutes mes sensations de l’été dernier me reviennent peu à peu... Sonnez hautbois et résonnez musettes !

jeudi 17 décembre 2009

Encore de l'effet

Tout le monde s’étonne, autour de moi, que je ne passe pas Noël au Japon, et que je n’aie aucun projet d’y aller dans un proche avenir. Je suis moi-même étonnée. Le petit pincement au coeur quand je pense au calme du Zojo-ji me rassure que ce n’est qu’une pause avant un autre grand voyage. Je n’ai pas envie d’horizons lointains en ce moment, ni d’être totalement dépaysée. Est-ce que les préparations pour le Nouvel An ont commencé au Zojo-ji ? Je sais ce que ça fait de s’asseoir au soleil sur un banc dans son enceinte, sous un érable aux feuilles encore rouges et d’écouter les bruits des marteaux entrecoupés par les cris des corbeaux. De ma petite rue anglaise je perçois les odeurs de nourriture qui se balladent dans l’air autour du temple. Un promeneur solitaire gravit les marches jusqu’au bouddha, tandis qu’on accroche les lampions aux armes des Tokugawa. Sur mon banc, je pense à la journée qui m’attend, à tout ce monde des possibles qui s’ouvre à moi : quel musée vais-je visiter ? quel film vais-je voir ce soir ? Vais-je retourner pour la millième fois au Loft ? Mais c’est si bon, après la folie londonienne, de se laisser envahir par la torpeur japonaise, que j’ai du mal à décoller de mon banc. Ho la la... non, le Japon, ce n’est qu’un au revoir, pas un adieu.

mercredi 16 décembre 2009

Blanche chapelle

Nous étions bien loin de la magnifique salle de lecture de la BNF rue Richelieu, mais l’expo Sophie Calle à la Whitechapel Art Gallery a de la gueule quand même ! A Paris, en juin 2008 (ici), l’accrochage, le parcours, était différent. Dans l’Est de Londres, c’est un peu déroutant de voir les oeuvres que l’on a connues en français, traduites en anglais. On a l’impression que ce n’est pas de la même Sophie Calle qu’il s’agit. On ressent moins d’émotion qu’à Paris. De la distance. Mais les salles sont belles, claires, spacieuses et elles ont une longue et passionnante histoire. Dans le bookshop pour jeunes branchés on vend Fragments d’un discours amoureux de Barthes. J'y achète L’Histoire de l’art de Gombrich. Surtout, c’est vendredi soir, et pour venir jusque-là on longe la Tour de Londres. Le café du premier étage est très sympa et le thé Earl Grey si bon qu’on regarde à deux fois l’étiquette : mais ce n’est qu’une marque des plus banales. Devant mon cup cake fleuri je m’aperçois – avec satisfaction – que je n’aime plus vraiment les gâteaux. C’est un endroit parfait pour les rendez-vous galants, « mais il est un peu excentré » conclut G. avec philosophie.

mardi 15 décembre 2009

Rue du Vieux Château

La première fois que je suis venue à Aldgate East, j’avais 23 ans et j’étais à Londres depuis 2 jours. Cela m’a fait énormément de peine de voir, vendredi, la bouche de métro condamnée au profit d’une plus tape-à-l’oeil de l’autre côté de Whitechapel High Street, en plein terrain de chasse de Jacques L’Eventreur.
C’est là, à la City of London Polytechnic, que j’ai été assistante de français. Une des plus belles années de ma vie. En arrivant, petite oie blanche, mon dieu que je crevais de peur ! J’avais du mal à avancer tellement mes jambes flageolaient. Et puis le rêve a commencé. Je me souviens du vrai premier cours de ma vie. J’étais comme un poisson dans l’eau. Mes étudiants avaient mon âge. Un jour d’octobre il y a eu une tempête dévastatrice. Tout était bloqué. J’adorais tellement cet endroit que j’avais bravé les éléments, les arbres arrachés et les embouteillages monstres pour venir. Les étudiants, eux, faisaient l’école buissonnière, évidemment ! Et c’est grâce à cela que j’ai vécu une journée mémorable. Avec mes collègues, que j’admirais, que j’aimais, nous étions allés en bande, déjeuner dans un pub du coin. Il y a très très longtemps, mais je me souviens encore combien nous étions joyeux ce jour-là d’être tous ensemble !
J’ai une vraie nostalgie de cet endroit qui ne paie pas de mine. C’est le berceau de mon attachement pour Londres, l’Angleterre et de l’amour de mon métier.

lundi 14 décembre 2009

C’était fatal...

Un jour, un dimanche, il y a quelques années, je suis entrée dans le hall du Barbican Centre. Pour voir un film peut-être, un concert ou une pièce de théâtre... Je ne sais plus. Il était assis sur une banquette. On s’est dit un bref bonjour, on se connaissait de vue. Mais je ne sais pas pourquoi, je n’ai jamais oublié l’avoir vu ce jour-là. En novembre dernier, j’attendais mon film dans un cinéma de Soho, je buvais un café en regardant la rue – je me souviens que j’écoutais une émission sur la vie de Descartes sur France Culture – et il est passé. Il a regardé les affiches et il a continué sa route sans me voir. Trois jours plus tard, on se croise et je lui ai dit que je l’avais vu passer dans la rue. C’était la première fois que je lui parlais. Même en le côtoyant depuis des années, je ne connaissais pas son nom. Et puis on a eu une réunion, et j’ai pu mettre un nom sur son visage. J’avais envie de lui parler du Barbican Centre, mais c'est si vieux, il allait me prendre pour une folle.
La semaine dernière, on a parlé pendant des heures comme si on se connaissait depuis toujours. Je ne lui ai pas demandé s’il se souvenait qu’on s’étaient vus, il y a longtemps, au Barbican Centre. Pas encore...