« Les étoffes parlent une langue muette, comme les fleurs, comme les ciels, comme les soleils couchants » écrit Baudelaire dans La chambre double (Petits poèmes en prose). Dans Elévation (Les Fleurs du Mal), il écrit : « Heureux celui (...) qui plane sur la vie, et comprend sans effort/Le langage des fleurs et des choses muettes ! » Comme le poète j’aimerais planer sur la vie et comprendre la langue muette du soleil couchant. Mais comment faire pour y parvenir ? Il nous faudrait tendre l’oreille à toutes ces langues muettes, comme celle que les toits chuchotent pour parler aux étoiles:
Voici que décline la lune lasse vers son lit de mer étale
Voici que s’assoupissent les éclats de rire, que les conteurs eux-mêmes
Dodelinent de la tête comme l’enfant sur le dos de sa mère
Voici que les pieds des danseurs s’alourdissent,
Voici que s’assoupissent les éclats de rire, que les conteurs eux-mêmes
Dodelinent de la tête comme l’enfant sur le dos de sa mère
Voici que les pieds des danseurs s’alourdissent,
que s’alourdit la langue des chœurs alternés.
C’est l’heure des étoiles et de la Nuit qui songe
S’accoude à cette colline de nuages, drapée dans son long pagne de lait.
Les toits des cases luisent tendrement.
C’est l’heure des étoiles et de la Nuit qui songe
S’accoude à cette colline de nuages, drapée dans son long pagne de lait.
Les toits des cases luisent tendrement.
Que disent-ils, si confidentiels, aux étoiles ?
Dedans, le foyer s’éteint dans l’intimité d’odeurs âcres et douces.
« Nuit de Sine » (Chants d’ombre) de Léopold Sédar Senghor
« Nuit de Sine » (Chants d’ombre) de Léopold Sédar Senghor