De retour à Ouarzazate, le dernier autocar part à 21 heures pour Marrakech. D'ici là, il faut patienter dans la brasserie aux murs décrépis de la gare routière où un vieux téléviseur diffuse en sourdine un match de football, tandis qu'un chat errant se faufile entre les jambes des hommes, en quête de quelques miettes. Le temps d'avaler une harira tiède (la soupe traditionnelle), l'heure a déjà tourné. L'heure de reprendre la route, la dernière, avec quelques regrets.
De Marrakech à Erfoud en bus de Marilyne Chaumont (ICI)
On tombe parfois, au détour de la lecture d’un journal, sur des articles si bien écrits, qu’ils nous donnent envie de boucler nos valises et nous font regretter qu’ils ne soient pas des romans.
J’étais surprise de la voir arriver à notre rendez-vous du samedi armée d’un grand parapluie et d’un pull chaud. "La journée serait autumnal" m’a-t-elle expliqué. Mais je restais dubitative devant le soleil radieux et le ciel bleu azur, par delà la vitre du café. Dans son carnet bleu elle a noté, au fil de notre conversation à bâtons rompus, des expressions aussi indispensables que « Arrêtons là les frais ! » et « Ça commence par me sortir par les yeux ! » Deux heures plus tard, en quittant notre café-école, l'automne [avait] fait mourir l'été comme le dit Apollinaire : bourrasques glaciales et trombes d’eau n’ont plus cessé de la journée.
Au lycée j’ai étudié l’oeuvre de ce poète et, avec le recul, nos professeurs nous forçaient un peu trop systématiquement à déceler entre les vers sa biographie, plutôt qu’à nous faire apprécier la musique de ses mots. Nous mettions ainsi à toutes les sauces le célèbre vers : Mon Automne éternelle ô ma saison mentale, car le poète était définitivement pour nous l’homme mélancolique qu’on nous désignait.
Selon cette logique implacable donc, si j’étais poète, mes vers de vendredi auraient été bien sombres... Ils auraient peut-être évoqué un frêle esquif navigant sur une mer démontée ou un vulnérable équipage traversant une forêt ténébreuse... Mais je préfère laisser aux éléments déchaînés d’hier le soin de parler de ma journée tourmentée de vendredi à laquelle, comme Mariza, j’aurais dû venir emmitouflée jusqu'aux yeux! Mais aujourd’hui il fait beau sur la ville et dans mon coeur...
Le titre de départ comportait une virgule, Nulle part, terre promise, ce qui supposait que notre terre promise consiste à attendre le nulle part. Puis j'ai décidé d'enlever la virgule, ce qui ne signifie pas que la terre promise est nulle part, mais plutôt qu'elle ne se trouve pas quelque part. En d'autres termes, ce n'est pas dans un lieu précis qu'il faut la chercher. L'idée de croire que la terre promise n'est pas un lieu est une idée ancestrale.
J’étais surprise de la voir arriver à notre rendez-vous du samedi armée d’un grand parapluie et d’un pull chaud. "La journée serait autumnal" m’a-t-elle expliqué. Mais je restais dubitative devant le soleil radieux et le ciel bleu azur, par delà la vitre du café. Dans son carnet bleu elle a noté, au fil de notre conversation à bâtons rompus, des expressions aussi indispensables que « Arrêtons là les frais ! » et « Ça commence par me sortir par les yeux ! » Deux heures plus tard, en quittant notre café-école, l'automne [avait] fait mourir l'été comme le dit Apollinaire : bourrasques glaciales et trombes d’eau n’ont plus cessé de la journée.
Au lycée j’ai étudié l’oeuvre de ce poète et, avec le recul, nos professeurs nous forçaient un peu trop systématiquement à déceler entre les vers sa biographie, plutôt qu’à nous faire apprécier la musique de ses mots. Nous mettions ainsi à toutes les sauces le célèbre vers : Mon Automne éternelle ô ma saison mentale, car le poète était définitivement pour nous l’homme mélancolique qu’on nous désignait.
Selon cette logique implacable donc, si j’étais poète, mes vers de vendredi auraient été bien sombres... Ils auraient peut-être évoqué un frêle esquif navigant sur une mer démontée ou un vulnérable équipage traversant une forêt ténébreuse... Mais je préfère laisser aux éléments déchaînés d’hier le soin de parler de ma journée tourmentée de vendredi à laquelle, comme Mariza, j’aurais dû venir emmitouflée jusqu'aux yeux! Mais aujourd’hui il fait beau sur la ville et dans mon coeur...
Le titre de départ comportait une virgule, Nulle part, terre promise, ce qui supposait que notre terre promise consiste à attendre le nulle part. Puis j'ai décidé d'enlever la virgule, ce qui ne signifie pas que la terre promise est nulle part, mais plutôt qu'elle ne se trouve pas quelque part. En d'autres termes, ce n'est pas dans un lieu précis qu'il faut la chercher. L'idée de croire que la terre promise n'est pas un lieu est une idée ancestrale.
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