mardi 22 juillet 2008

Mes campagnes

La bataille d’Austerlitz, je l’avais envisagée du côté russe en regardant l’envoûtant Guerre et Paix (1965/7) de Sergei Bondarchuk. L’image du beau Prince Andrei Bolkonsky qui, grièvement blessé, allongé sur un canon dans la désolation du champ de bataille, admire la beauté du ciel en murmurant des phrases si pures qu’on a peur d’en perdre une miette, est un souvenir impérissable. Cette adaptation du roman fleuve de Tolstoï nous entraîne au sein de ce « pêle-mêle de casques, de cris, de sabres, bondissement orageux des croupes des chevaux dans le canon et la fanfare, tumulte discipliné et terrible » (Victor Hugo).
Quant à la bataille de Waterloo, c’est à travers les yeux de Fabrice del Dongo dans La Chartreuse de Parme de Stendhal, que je l’avais suivie : « Nous avouerons que notre héros était fort peu héros en ce moment. Toutefois la peur ne venait chez lui qu’en seconde ligne ; il était surtout scandalisé de ce bruit qui lui faisait mal aux oreilles. (...) Le maréchal [Ney] s'arrêta, et regarda de nouveau avec sa lorgnette. Fabrice, cette fois, put le voir tout à son aise ; il le trouva très blond, avec une grosse tête rouge. (...) Il regarda les hussards ; à l'exception d'un seul, tous avaient des moustaches jaunes. Si Fabrice regardait les hussards de l'escorte, tous le regardaient aussi. Ce regard le fit rougir, et, pour finir son embarras, il tourna la tête vers l'ennemi. »
Hier, en tournant les captivantes dernières pages de la biographie de Frances Burney (ICI), c’est toute l’épopée napoléonienne vue du côté anglais que j’ai redécouverte. En 1802, Fanny est mariée au Général d’Arblay, un émigré royaliste, ils ont très peu d’argent pour vivre. Elle suit son mari en France où il espère récupérer ses biens abandonnés à la Révolution. Mais en 1806 Napoléon instaure le Blocus Continental (ICI), la guerre entre la France et l’Angleterre reprend, et pendant 10 ans Fanny ne pourra remettre les pieds en Angleterre et n‘aura aucune nouvelle de sa famille. C’est difficile d’imaginer cela aujourd’hui avec tous les moyens de communication dont nous disposons ! Ses émouvantes retrouvailles avec son père sont à la mesure de ce long silence forcé.
Napoléon une fois exilé à l’Île d’Elbe, le Général d’Arblay fait partie de l’entourage de Louis XVIII. Coup de théâtre : Le 1er mars 1815 Napoléon débarque à Golfe-Juan, et c’est le Vol de l’Aigle jusqu’aux Tuileries et la période des Cent-Jours qui prendra fin le 18 juin 1815, à Waterloo. Louis XVIII et ses fidèles ont fuit vers le Nord. Attendant un bateau pour l’Angleterre, Fanny est à Bruxelles et elle verra débarquer pendant des semaines, dans un flux continu, les survivants et les morts de cet effroyable carnage. En Belgique, elle rencontrera Chateaubriand qui raconte dans Mémoires d'Outre-tombe comment il a vécu le 18 juin 1815: "Vers midi, je sortis de Gand par la porte de Bruxelles (...). Je cheminais lentement, plongé dans ma lecture. J'étais déjà à plus d'une lieue de la ville, lorsque je crus ouïr un roulement sourd : je m'arrêtai, regardai le ciel assez chargé de nuées (...). Ces détonations moins vastes, moins onduleuses, moins liées ensemble que celles de la foudre, firent naître dans mon esprit l'idée d'un combat. Je me trouvais devant un peuplier planté à l'angle d'un champ de houblon. Je traversai le chemin et je m'appuyai debout contre le tronc de l'arbre, le visage tourné du côté de Bruxelles. Un vent du sud s'étant levé m'apporta plus distinctement le bruit de l'artillerie. Cette grande bataille, encore sans nom, dont j'écoutais les échos au pied d'un peuplier, et dont une horloge de village venait de sonner les funérailles inconnues, était la bataille de Waterloo !"
Et maintenant, après quelques pièces de théâtre comique de l’époque de la Restauration Anglaise (1660-1689) (ICI), je ferai l’ascension du Dit du Genji par sa face nord!

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