samedi 4 avril 2009

Petits plats pour grandes scènes

Après les spaghettis à la Carbonara de Genova de Michael Winterbottom (en fait, la Carbonara c’est bien une sauce blanche non ? Dans le film on voit une sauce rouge... J’ai remarqué ça parce que je n’aime pas du tout les spaghettis à la Carbonara !), ce sont les plats chinois de Two Lovers de James Gray qui m’ont intriguée: Leonard vient de rencontrer Michelle, sa voisine. Elle est dans le couloir, on entend des cris, elle dit que c’est son père qui fait des siennes, et il lui offre de se réfugier chez lui. Elle fait trois petits tours dans l’appartement, quand soudain la mère de Leonard apparaît dans l’entrebâillement de la porte de la cuisine, interroge la présence de Michelle du regard, et lance à son fils, avec une certaine gourmandise dans la voix : « Ce soir on mange chinois ». Le « on » excluant Michelle, bien évidemment. Plus tard, elle amène sur la table de la salle à manger de petites boîtes en carton, un « take away » que le père a dû ramener de chez le traiteur chinois. Michelle en profite pour s’éclipser. C’est une scène qui peut paraître anodine, mais elle résume parfaitement le fonctionnement de cette famille. Dans Tokyo Sonata de Kiyoshi Kurosawa, la famille Sasaki est réunie un soir, pour partager un repas. Ils sont tous les quatre – pour la dernière fois d’ailleurs je crois - autour de la table... Le silence qui règne est terrible. Le père décapsule alors une bouteille de bière. Il la boit très très lentement. Il la savoure. Il prend son temps. Ce n’est que quand il l’a finie, et après avoir dit « itadakimasu », qu’ils prennent leurs baguettes et qu’ils se mettent à manger. On pourrait dire qu’il a fait durer, perversement, le plaisir, pour montrer qui est le chef de la maisonnée, peut-être... Mais ce supplice de Tantale est une marque traditionnelle de respect... Cette scène est très simple et très triste, et elle résume de façon éclatante l’effritement du rôle du père dont le royaume s’est réduit comme une peau de chagrin et ne s’exerce plus qu’autour de la table de la salle à manger... et encore pour très peu de temps car si je me souviens bien, à la fin, ils ne sont plus que trois autour de la table, et comme il est le dernier à retourner au bercail après leurs folles aventures, les deux autres n’ont pas attendu son retour pour manger !

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