lundi 6 avril 2009

L'air Meiji

« En 1868 le Japon entre dans l’ère Meiji... » A chaque fois que je vais au Meiji-jingū, un sanctuaire dédié aux âmes divines de l’empereur Meiji et de l’impératrice Shōken, cette phrase, que j’avais apprise par coeur lors de mes révisions du bac, me revient en mémoire. C’était tellement abstrait à l’époque! Avais-je compris que Meiji était le nom d’un empereur? Savais-je au moins ce qu’il y avait eu avant ? Rien n’est moins sûr. Peut-être imaginais-je l’ère Meiji comme une porte derrière laquelle la prospérité attendait le Japon... Cette phrase m’est restée gravée en mémoire avec celle-ci « Tokyo est une mégalopole tentaculaire ». A chaque fois que je passe à Yokohama, je me souviens comment, de ma chambrette tourangelle, j’imaginais qu’il s’agissait vraiment des tentacules d’une pieuvre géante à la Jules Verne... et dans ce cas-là, oui, ce devait être invivable ! Cela ne m’avait servi à rien à l’époque de connaître sur le bout des doigts l’Ere Meiji, parce que c’est du Sertaõ brésilien que j’ai dû parler au bac. Je m’en suis bien sortie car le Sertaõ était bien plus évocateur pour moi que le Japon, grâce à la chanson éponyme de Bernard Lavilliers : le Sertaõ regorge de « fazendeiros »; dans le Sertaõ « il n’y a rien »; le soleil y est « ivre de rage » car un « éternel été [l’] émiette ». Je savais même prononcer le mot avec l’accent brésilien: « sertan sertan sertan ».Mais bon... le temps a passé... et maintenant, en traversant l’épaisse forêt vers le sanctuaire, en surprenant quelques gras corbeaux fourrageant dans le sol, je sais que ce lieu appartenait à la fin du XVIe siècle au féroce guerrier Katō Kiyomasa, une des « sept lances de Shizugatake », du nom d’une bataille de 1583 où il était un des 7 généraux de Toyotomi Hideyoshi qui y écrasèrent les troupes de Oda Nobutaka. Et cela me fait hâter le pas !
En fait c’est la poésie qui m’attire surtout dans ces lieux, même par une journée pluvieuse comme l’était celle-ci.L'empereur Meiji aimait composer des poèmes de 31 syllabes appelés « tanka ». Il en a écrit plus de 100 000 ! L’impératrice, elle, en a laissé 30 000... Certains d'entre eux, sous forme de petits rouleaux, se déroulent comme des Omikuji. Mais ceux-ci ne sont pas des prédictions bonnes ou mauvaises. Ils mettent surtout du baume au coeur de ceux qui les piochent.
Such is the force of water
That it will with gentle pressure
Shape itself to every vessel
And yet pierce the very rock.


Should you but resolve to climb
That peak towering to the heavens,
You will find there is a pathway
To its very summit.

We shall fall behind
Our fellows in the world
If, when we should advance,
We make no move at all.

Emperor Meiji

My mirror every morning,
So spotlessly clear-
Thus might it ever be
With the human heart!


Empress Shōken
Ils font si souvent mouche que les yeux me picotent en rejoignant l'avenue Omotesando.

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