Zuihitsu ou "notes au fil du pinceau", comme en composaient les gentes dames de la cour de Heian au Japon, aux environs de l’an 1000: « J’ai rassemblé des notes sur les événements qui s’étaient déroulés devant mes yeux et sur les réflexions que j’avais faites en mon âme » (Sei Shōnagon dans Notes de chevet)
samedi 28 février 2009
Visiteur du Soir
vendredi 27 février 2009
The grass is always greener...
Ha, la charmante Colette s’extasiant d’être abordée par un SDF dans la rue, tirant la rapide conclusion qu’à Londres on s’aborde tous comme ça dans une convivialité sans cesse renouvelée... Vraiment, mais dans quelle ambiance gaie nous vivons ici, le savions-nous?
Il y a aussi le moment où un de ses interlocuteurs l’amène à la Pâtisserie Valérie où les gâteaux, pour très jolis qu’ils soient, sont connus pour leur goût insipide. Elle glousse à tout bout de champ, comme si elle n’avait jamais voyagé... Une vraie pintade.
Mais le pompon c’est quand le « spécialiste » de cinéma, homme sympathique au demeurant mais qui ne parle que de lui et de son intérêt pour l’identité des voitures et des trains qui passent dans les films de Godard (no comment) – passion qu’il partage avec de drôles d’hurluberlus - connu pour s’être vanté un jour de fuir les salles obscures car selon lui aucun film n’arriverait aux chevilles de ceux du grognon ermite suisse (mais comment a-t-il pu croiser le chemin de notre Colette nationale pour parler de Londres et du cinéma !?) – l’emmène dans son bureau et chez lui, dans d’omniprésents bruits de clé et de portes qui claquent comme s’il était le gardien du donjon de la Tour de Londres... on a beau chercher le rapport entre lui, Londres et le cinéma, en vain. C’était très amusant et horripilant aussi.
Londres en ce dernier vendredi de février, est très belle, en tout cas si j’en juge par la belle lumière dans laquelle baigne mon quartier, ma rue, mon appartement, le mur que je vois couvert de photos en face de mon ordinateur... Londres rayonne sous le soleil, sous le ciel bleu. J’aime imaginer ses millions d’habitants s’agitant jusqu’à plus soif pour la faire vivre... Cette pensée rend encore plus sensible le plaisir que je prends à profiter du calme des quatre prochains jours.
jeudi 26 février 2009
Tour de Tours dominical
Je ne sais pas pourquoi mais, à chaque fois que j’emprunte cet itinéraire, je me mets à imaginer ce qui ce serait passé si je n’étais pas restée à Londres, si j’étais revenue au bout de mes 9 mois d’assistanat... J’aimerais vraiment savoir ce que serait ma vie aujourd’hui si un soir de novembre 1987 je n’avais pas traversé Clissold Park à Stoke Newington en rentrant chez moi, si le coucher de soleil sur la vieille église en bordure du parc ne m’avait pas autant émerveillée et donné envie de rester en Angleterre...
mercredi 25 février 2009
Une retraite argentée
mardi 24 février 2009
Au coeur de Londres mais au Japon
Quand la lumière s’est éteinte, la phrase suivante s’est inscrite sur un écran : Prochain arrêt Kyoto. Un vieil homme, en costume de ville, s’est avancé et nous a raconté sa visite sur la tombe de son père. Je ne sais pas si c’était un souvenir personnel, en préambule à la pièce, ou si cela en faisait partie. A la fin de son récit, il a revêtu un costume japonais traditionnel, et s’est assis dans le noir. Toute la pièce se déroulera à la lueur des bougies. Les auteurs se sont inspirés de Eloge de l’ombre de Tanizaki.
Une femme est alors entrée sur scène. Elle venait enregistrer la nouvelle Shunkin de Tanizaki pour la NHK. Elle avait des problèmes de coeur. Les relations mièvres et drolatiques entre son amant et elle, que l’on devinait par leurs conversations téléphoniques, contrebalançaient celles sado-masochistes de Shunkin et Sasuke.
Elle se met à lire le texte quand un acteur – en fait le narrateur de la nouvelle voire Tanizaki lui-même – lui vole la parole. Ce passage de témoins subtil nous plonge au XIXe siècle. Nous accompagnons le narrateur dans un « cimetière » où, sous un pin, se trouvent les deux tombes de Shunkin et son serviteur, élève et amant, Sasuke. Les autres comédiens agitaient des planchettes en bois au dessus des tombes (deux comédiens immobiles). Ces planchettes formeront aussi des encadrements de portes et délimiteront des pièces, des couloirs, des maisons, des toits...
L’écran au fond de la scène se couvrait de kanjis, de photographies, de silhouettes, d’oiseaux... Shunkin enfant était une marionnette, que deux comédiens vêtus de noir manipulaient comme dans le bunraku... mais il m’a fallu plusieurs minutes pour m’apercevoir que c’était un être de chair qui jouait Shunkin adulte... Il y avait des morceaux de papier qui devenaient des oiseaux ou des âmes... Parfois, quand la lumière tombait sur Shunkin et Sasuke enlacés, leurs deux ombres projetées sur l’écran dessinaient une araignée dévorant sa proie. Et nous avons vu vieillir Sasuke : il répétait les mêmes gestes avec, à chaque fois, une différence infime, jusqu’à sa mort.
C’était vraiment d’une beauté, d’une profondeur, et d’une ingéniosité à couper le souffle. Ça m’a fortement remuée, même lessivée, et surtout, ça m’a rendue euphorique!