vendredi 13 août 2010

Danton la Carmagnole

Les oeuvres complètes de Shakespeare tapissent les murs de la librairie du National Theatre sous tous les supports possibles. On y puise toujours un peu de réconfort. En effet, imaginons que ce soit la fin du monde – Alas ! - et qu’on doive tous s’exiler sur la lune en n’emportant qu’un seul livre sous le bras... Il suffirait de choisir les oeuvres complètes du Bard pour ne jamais s’ennuyer. Dans My Darling Clementine de John Ford que j'ai vu hier, une troupe de théâtre ambulante vient égayer les soirées des cowboys de Tombstone en leur jouant Hamlet !

Au mois d’octobre j’irai de nouveau voir Hamlet. Comment s’en lasser ? C’est sûrement un pied de nez à mes premières semaines de fac, quand c’était la première oeuvre au programme et, qu’affolés, pestant contre nos profs, nous n’en comprenions pas un traître mot ! On nous avait emmenés voir Richard Fontana dans le rôle titre au Théâtre National de Chaillot à Paris. C’était Antoine Vitez qui l’avait mis en scène. Les décors – des voiles blancs tels des draps qui sèchent au soleil sur une terrasse - étaient splendides de sobriété.

Sur l’affiche (ici) Rory Kinnear prend la pose de circonstance, qui n’est pas celle d’un gai-luron. Pour pouvoir profiter pleinement de la nouvelle mise en scène, il faut connaître la pièce sur le bout des doigts. La lire et la relire en anglais et même en français. C’est une langue si belle, si riche... moi je veux apprécier chaque mot, chaque sonorité, les tourner dans tous les sens, les comprendre tout en leur laissant leur mystère. Sans un coup de pouce, le temps que cette alchimie se produise, les lumières se seront rallumées ! Il faut que je comprenne en un quart de seconde que O, that this too too solid flesh would melt,/Thaw, and resolve itself into a dew;/Or that the Everlasting had not fixed/His canon ’gainst self-slaughter signifie qu’Hamlet est déprimé et qu’il voudrait bien se suicider mais comme l’Eternel le réprouve, cela ne l’arrange guère...

Enfin, Hamlet c’est en automne. Il y a deux jours j’étais au National Theatre pour voir Danton’s Death de Georg Büchner. Ils étaient venus, ils étaient tous là, essayant de se convaincre mutuellement avec un accent pas toujours révolutionnaire : Djorge Dannetonne, l’Incorruptible Rob(e)spierre, l’Ange de la Révolution Saynte-Djustte, Kemeele (Desmoulin)... Quelques planches, une table, une caisse, suggéraient le Tribunal révolutionnaire, l’intérieur d’une maison XVIIIe avec ses hautes fenêtres, un cachot, un estaminet... Ajoutez-y une lame bien aiguisée, et le tour est joué !

Quand on parle de Londres on s’exclame souvent « Oh les théâtres londoniens ! » Et je me sens bien bête de ne pas en profiter. Pourquoi vais-je plus volontiers voir un film dont je ne connais ni l’intrigue, ni les acteurs, ni le réalisateur qu’une pièce de théâtre ? C’est vraiment étrange. Il n’y a vraiment pas photo entre la formidable Mort de Danton au National Theatre et le navet italien vu à l’UGC Danton la semaine dernière ! De l’audace, voilà ce dont j’ai besoin !

1 commentaire:

Ren a dit…

Vous m'avez inspiré de savoir plus sur ce Dantons Tod. J'ai trouvé cet article. Le conflit entre le cinéma contemporain et l'art d'antan est bien curieux. Nous sommes tous trempés dans un zèle de regarder quelque chose de nouveau, et c'est presque un sacrilège de dire combien c'est décevant. Bonne journée.