dimanche 4 avril 2010

Souriez, vous êtes photographié!

Je ne sais plus comment s’appelait ce cinéma de Tours, place Thiers, aujourd’hui disparu, où, étudiante, j’avais vu mes premiers films en v.o. : quelle révolution à l’époque ! Près de la caisse, pour déjouer sans doute l’éventuelle mauvaise humeur de la clientèle, se trouvait une affichette nous enjoignant de sourire car « un sourire vaut de l’or, c’est gratuit etc. » Affichette que l'on voyait chez certains commerçants autrefois. J’ai repensé à ça au Trocadéro, en tombant sur L’Ange au sourire qui provient de la cathédrale Notre-Dame de Reims. Ce n’est pas un sourire béat qu’arbore cet angélique visage, c’est vraiment un sourire humain, franc et bien heureux car, pour sourire ainsi, il faut être heureux et satisfait de soi. Sur la façade de Notre-Dame de Paris, ces têtes couronnées sourient car elles se trouvent du bon côté, celui du Paradis.Maurice-Quentin Delatour exposa cet autoportrait au Salon 1737 sous le titre « L’auteur qui rit ». Il semble montrer, par le jeux des reflets, son célèbre pastel présentant la Marquise de Pompadour « dans son intérieur, entourée d'objets significatifs et familiers » sur le mur d'en face. Si sourire c’est agréable, regarder quelqu’un sourire, d’un sourire qui ne soit pas moqueur, voir des yeux rieurs, c’est encore mieux. Un sourire embellit, rend aimable.En avril 1735, Voltaire posa pour Maurice-Quentin Delatour. Ce portrait (ici) le rendit célèbre. Voltaire, qui nous regarde d’un sourire un peu insolent, a 41 ans. Il aima tant ce portrait qu’il en fit faire de nombreuses copies. Il est beau, on a envie de le rencontrer et de le lire. Il est un peu plus âgé sur la façade de l’Hôtel de Ville de Paris, mais il sourit plus franchement.Quel est le roi qui, « tous les matins se réveillait de bonne humeur, [qui] faisait bonne figure et montrait un ‘joyeux visage’, [qui] ‘se truffait de paroles joyeuses et honnêtes’ ? Charles V, bien sûr. J’ai enfin trouvé sa statue souriante au Louvre. Un autre roi sourit dans sa barbe, c’est François 1er!
Le 13 mai 1610, la veille de sa mort, ce pauvre Henri IV assiste en souriant au sacre de Marie de Médicis en l’abbatiale de Saint Denis... mais que cela n’empêche personne de sourire à la vie ! En flânant dans Paris, en répertoriant çà et là les sourires de bronze, de marbre, de peinture, de plâtre, et ceux bien vivants que je croisais sur les visages, j’ai pensé que sourire c’était vraiment une des plus belles choses au monde, c’est simple et compliqué à la fois, mais c’est la preuve d’un état d’esprit particulier qu’il faudrait cultiver pour dire adieu à la soupe à la grimace.
Cela me fait sourire
un printemps à nouveau
sous le ciel du voyage

Bashô

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