Je crois que la formule « lecture obligatoire » est un contresens ; la lecture ne doit pas être obligatoire. Parle-t-on de plaisir obligatoire ? À quoi bon ? Le plaisir n'est pas une obligation, c'est une quête. Bonheur obligatoire ! Le bonheur aussi est une quête. J'ai été professeur de littérature anglaise pendant vingt ans à la faculté de philosophie et de lettres de l'université de Buenos Aires. J'ai toujours donné ce conseil à mes étudiants : si un livre vous ennuie, abandonnez-le ; ne lisez pas un livre parce qu'il est fameux, ou moderne, ou ancien. Si un livre vous semble ennuyeux, laissez-le ; même si ce livre est le Paradis perdu - qui pour moi n'est pas ennuyeux - ou Don Quichotte - qui pour moi ne l'est pas davantage. Mais si un livre vous ennuie, ne le lisez pas ; c'est qu'il n'a pas été écrit pour vous. La lecture doit être une des formes du bonheur : voilà pourquoi je conseillerais aux possibles lecteurs de mon testament - que je n'ai d'ailleurs pas l'intention de rédiger - de lire beaucoup, de ne pas se laisser effrayer par la réputation des auteurs, de rechercher un bonheur personnel, un plaisir personnel. Il n'y a pas d'autre façon de lire.
Jorge Luis Borges
Avant-hier j’écrivais que je ne me souvenais pas trop de mars 2008. Comment pouvais-je alors affirmer que c’était une période heureuse, sans preuve, puisque je ne tenais ni Journal, ni Carnet, ni blog? Pourquoi avais-je ce sentiment? Et puis j’ai eu l’idée de jeter un coup d’oeil dans des cahiers que je tenais depuis 2007, des sortes de scrap books, achetés par dizaines chez Muji, que j’aimais pour leur sobriété et leur format. Jusqu’à l’automne dernier j’y collais des photos que j’aimais, des articles sur des sujets qui m’intéressaient, mais où je n’écrivais jamais ce qui se passait dans ma vie. Pour cela, je préférais écrire de longues lettres.
Jamais ? Pourtant, pour la première fois, en mars dernier, j’avais dérogé à la règle. Peut-être parce que ça ne devait pas aller fort du tout et que j'avais besoin de (me) l'exprimer clairement... C'est la lecture qui m'a sortie de ce marasme. Le 9 mars 2008 je commençais Olympio ou la vie de Victor Hugo. Le 23 mars je finissais ce magnifique livre et m’inquiétais de n’avoir plus rien à lire. Quelques jours plus tard, sans dire comment ce livre providentiel m’est tombé entre les mains, je lisais Splendeurs et Misères d’une favorite de Dame Nijō, où je découvrirais, entre autres, les noms d’Uji et de l’Iwachimizu Hachimangu, deux lieux où, grâce à lui, je suis allée depuis. Je me souviens du bonheur que j’éprouvais à vérifier chaque référence historique et géographique. Je voulais voir à quoi ressemblait chaque temple où elle avait mis les pieds, chaque oiseau, chaque plante qu’elle avait croisés lors de ses pérégrinations dans le Japon médiéval.
Je ne sais pas combien de temps m’a pris la lecture de ce livre dont j’ai épluché chaque page avec délice. Mais, en feuilletant mes Cahiers, j’ai été contente de constater que, par rapport à l’an dernier, ma vie est bien plus jolie aujourd’hui !
3 commentaires:
Tes longues lettres aussi ressemblaient aussi à de jolis scrapbooks !
heureuse conclusion que celle de ce billet...
Des bises, de l'autre côté de la terre.
Et des bises de mon cote aussi! xxx
Konnichiwa;
Je prends toujours autant de plaisir à lire ton blog :) ^ne t'arrête pas onegaishimasu...
Je te fais beaucoup de bisous d'Orléans où le printemps se fait sentir.
Lily^^
Enregistrer un commentaire