Je trouve jolis les noms des villes japonaises. En les égrenant, ils me font faire un voyage parallèle à la voie de chemin de fer, ils me font prendre la tangente. Gion m’évoque les Geishas. Kiyomizu un coucher de soleil. Fushimi Inari Kitsune le renard, messager de la déesse Inari. Fukakusa est le nom de l’empereur, amant de Nijō. Aperçoit-on la montagne sacrée de la ville de Fujinomori? Y a-t-il encore une île dans celle de Chushojima ? Mais nous voici à Yawata dont les kanjis signifient: « Huit bannières ». Nous sommes le premier jour de l'hiver.Il faut sortir de la gare et prendre le funiculaire qui nous mène jusqu’à la station Otokoyama Sanjo, tout en haut de la montagne. Je n’étais pas seule dans le tortillard : à part le conducteur, il y avait un grand-père et son petit-fils. Quelle chance de pouvoir faire sa promenade du dimanche au sommet du Mont Otoko !
La végétation des deux côtés du chemin avait des allures de jungle. Les bambous coupés et tombés en vrac, me faisaient penser à des baguettes d’un jeu de mikado géant.Nous n’étions que 3 visiteurs: le grand-père, son petit-fils et moi. Je me demandais si le pavillon où Nijō avait passé la nuit avec l’Empereur Fukakusa avant que l’aube ne les surprenne, était encore debout. Où était-il ? Mais n’est-ce pas un peu puéril de penser à ce qui s’était passé il y a 8 siècles ? Qu’importe ! Cette histoire d’amour d’antan colorait ma visite et la rendait encore plus excitante. Surgissant d’un pavillon niché dans la bambouseraie, des moinillons sont apparus, tout de blanc vêtus, portant sur leurs frêles épaules un immense tronc de bambou. A une de ses extrémités on avait attaché l’embout d’une flèche : le dieu Hachiman est celui de la guerre. Devant eux, l’air martial, juché sur d’étranges chaussures de bois noir laqué à faire pâlir d’envie toutes les fashionistas de la terre, un Grand Prêtre, l’air martial, se pavanait en tenue de cérémonie rose saumon et parme. Cette petite procession s’arrêta devant le pavillon principal où les attendaient d’autres moines qui entreprirent de redresser la flèche. Cette cérémonie se répéta deux fois, aux accents de prières entonnées par des moines que je ne voyais pas. J’ai fait le tour du sanctuaire en admirant ses célèbres lanternes de bronze. Visiblement, le temple faisait peau neuve avant les fêtes de la nouvelle année.
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