dimanche 5 octobre 2008

Alea jacta est

A trois jours de la vraie rentrée, les scènes d’ Il y a longtemps que je t’aime de Philippe Claudel se déroulant à l’Université de Nancy m’ont particulièrement intéressée : les murs sont immaculés, les étudiants - qui prennent diligemment des notes et semblent obéir au doigt et à l’oeil à leurs profs – sont propres sur eux et d’une érudition prodigieuse. La façon dont Léa s’adresse à eux et les rembarre, nous vaudrait directement la porte ici. On dit qu’elle est, dans son domaine (la littérature française ?), « une des plus brillantes de France ». Plus tard, elle dira à sa soeur Juliette qu’elle publie moins, qu’elle fait moins de colloques, depuis qu’elle a adopté ses deux petites filles. Ce qui équivaut à un creux dans sa carrière d’enseignante-chercheuse. Lors d’un séminaire sur Dostoïevski qui arrive comme un cheveu sur la soupe – il sonne incongru vu la spécialité de Léa – une discussion ampoulée sur le meurtre et la culpabilité tente très maladroitement de nous faire réfléchir à l’intrigue du film. Un étudiant imperturbable avance des arguments incompréhensibles, tenant la dragée haute à une Léa qui monte sur ses grands chevaux, ramasse ses affaires et se réfugie dans son bureau. Je n’ai pas pu m’empêcher de penser à ce qu’un tel départ intempestif aurait sur des étudiants. Le professeur dont je me suis sentie proche est Michel (Laurent Grévill, génial), sauf au sujet des tonnes de corrections qu’il remet au lendemain au sujet desquelles on le taquine : moi, je les fais tout de suite ! Michel dit que les colloques, la recherche, toutes ces discussions entre spécialistes, bof... il s’en est lassé parce que « la vie nous change ». J’imagine une rencontre avec son collègue Roland Verneuil (Fabrice Luchini), prof de fac dans Paris de Cédric Klapisch, qui ne veut pas « finir » comme un de ses collègues, obsédé par des points obscurs de sa recherche qui n’intéressent que lui.
Un vrai dimanche d'automne comme je les aime touche à sa fin. Désormais, et jusqu’au 12 décembre, je vais vivre dans un entre-deux permanent: je souhaite qu’il fasse beau quand j’ai une longue journée de cours "entre les murs" comme horizon pour me faire désirer que le temps s’accélère et froid à pierre fendre tous les autres jours, pour que les minutes s'alanguissent devant une cheminée qui n'existe que dans mon imagination. Mais j'ai surtout hâte de voir se diluer la fatigue de la semaine dans le goût de la liberté retrouvée, tous les jeudis soirs à 21h.

1 commentaire:

Anonyme a dit…

Dans ce film que j'ai vu parce qu'un ami l'avait beaucoup aimé à cause de Kristin Scott Thomas (rare d'ailleurs de voir une actrice s'exposer autant le visage nu), j'ai beaucoup moi aussi aimé Michel: sa capacité à "entendre" les autres au dela des mots et à être là, quand il faut, comme il faut: tellement respectueux de l'autre