vendredi 5 février 2010

Viens ici, viens ici, viens ici

Chanson sous l’arbre vert

Que celui qui sous l’arbre vert aime s’étendre avec moi et moduler son chant joyeux
d’accord avec le doux gosier de l’oiseau,
vienne ici, vienne ici, vienne ici.
Ici il ne verra d’autre ennemi que l’hiver et le mauvais temps.
Que celui qui fuit l’ambition et aime vivre au soleil
cherchant sa nourriture et satisfait de ce qu’il trouve
vienne ici vienne ici vienne ici
Ici il ne verra d’autre ennemi que l’hiver et le mauvais temps.

As you like it de William Shakespeare (Sc.5 Acte 2)
En ce moment, il suffit de tourner le bouton d'une radio pour entendre en boucle le dernier tube de Marc Lavoine "Reviens mon amour" (ici). Ce que j’aime dans cette chanson c’est quand, à la fin d’un long monologue parlé où il énumère tout ce qu’il a perdu, il dit, ou plutôt gémit : « Oh viens me retrouver ». J’adore cette phrase - ce n'est pas la même chose de dire Viens me retrouver et Retrouvons-nous à telle heure - et la façon dont il la prononce. J’ai l’impression que le refrain est fait des fragments d’une lettre déchirée, ou des bribes d’une conversation. A chaque fois que je l’entends j’essaye d’y mettre de l’ordre, j’essaye de reconstituer le message entier, et j’imagine à qui il s’adresse. Mais cette phrase « Oh viens me retrouver »... elle me donne des frissons. Ce n'est pas un ordre, c'est un appel. On peut la prononcer pour soi-même quand on sent que l’on s’est un peu perdu de vue. On peut être dans une situation telle que l’on a besoin du soutien d’un ami. Mais le plus agréable c’est de la dire quand on sait que c’est impossible que ces retrouvailles aient lieu avant plusieurs heures. Par exemple au moment de rentrer dans une salle de cours, quand on est coincé dans un bâtiment gris, et qu’à l’autre bout du fil et de la ville on s’apprête à prendre la parole devant un parterre d’universitaires armés jusqu’aux dents. La prononcer à ce moment-là c’est imaginer une scène de cinéma, ou un monde idyllique où on ne vivrait que d’amour et d’eau fraîche, sous les arbres verts, bercés par des chants d’oiseaux.

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