Une vie charmante et libre commença pour Jeanne. Elle lisait, rêvait, et vagabondait, toute seule, aux environs. Elle semait partout des souvenirs comme on jette des graines en terre, de ces souvenirs dont les racines tiennent jusqu’à la mort. Elle nageait à perte de vue. Elle se sentait bien dans cette eau froide, limpide et bleue. Lorsqu’elle était loin du rivage, elle se mettait sur le dos, les bras croisés sur sa poitrine, les yeux perdus dans l’azur profond du ciel que traversait vite un vol d’hirondelle, ou la silhouette blanche d’un oiseau de mer. On n’entendait plus aucun bruit que le murmure éloigné du flot contre le galet et une vague rumeur de la terre glissant encore sur les ondulations des vagues, mais confuse, presque insaisissable.
Une Vie de Guy de Maupassant
Le plus dur, ces temps-ci, a été de trouver la concentration nécessaire pour lire un livre de sa première à sa dernière page. Je commençais un bouquin et, au bout de quelques pages, j’en voulais un autre, je le commandais, il arrivait, je l’ouvrais et au bout de quelques pages, j’en voulais un autre... C’est épuisant et frustrant quand on adore lire. Il aurait fallu que je rentre littéralement dans le livre, que ce ne soit pas moi qui le trimballe aux quatre coins de la ville, mais que ce soit lui qui me porte, me relâche devant la porte de mes classes, et me récupère à la sortie des cours. Ah ! Vivre dans un livre comme le rat de la fable vit dans un fromage et le grignoter mot après mot ! Et puis... je suis tombée sur Une Vie de Maupassant, qui a aussitôt mis fin à cette fuite en avant. Depuis je vis sous (une) cloche... à fromage bien sûr !
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