mercredi 28 mai 2008

Une chambre à soi

A woman must have money and a room of her own if she is to write fiction.
Virginia Woolf

Tout en haut, tout en haut de sa grande maison, elle s’est aménagé un petit havre de paix. Elle me le faisait visiter en l’appelant tantôt « chambrette » tantôt « nid d’aigle », selon qu’elle saluait son rôle de cocon protecteur et douillet ou la distance qui la séparait du tumulte des étages inférieurs. En savourant enfin le goût de la liberté, elle a ajouté : « j’ai de nouveau envie d’écrire ». Et nous avons évoqué ensemble, en rigolant, la célèbre phrase de Virginia Woolf. Hermione Lee, dans la biographie de cet écrivain, raconte que pendant le Blitz une bombe est tombée sur la maison de Virginia dans Bloomsbury. A ses risques et périls, pour tenter de récupérer quelques effets, celle-ci se rend seule sur les lieux et ne retrouve que des gravats. Elle s’éloigne ensuite, dans la grisaille et la désolation. Je me représente souvent cette scène. J’imagine une toute petite silhouette, en tailleur gris, plantée devant un tas de décombres immenses, trop grands pour être ceux d’une maison. Peut-être parce que cet hôtel très moche se tient aujourd’hui à cet endroit et que mon esprit superpose les deux bâtiments.

Aucun commentaire: